Suite à l'opposition catégorique de General Motors d'approuver la cession partielle de son ancienne marque (depuis 1990) Saab Automobile, actuellement détenue par Swan (ex-Spyker), la marque au griffon vit ses derniers jours d'angoisse. Ses employés qui n'ont pu être payés en novembre continuent de venir à l'usine de Trollhättan. Victor Muller, dirigeant de Swedish Automobile (Swan), se démène pour tenter la négociation de la dernière chance. Des milliers d'enthousiastes se préparent au pire, mais ils sont prêts à se mobiliser en force si ce pire devait arriver. Le gouvernement suédois, impassible, continue de faire des déclarations convenues à propos d'un secteur industriel que ses conseils économiques financiers regardent comme un vestige d'un autre temps et dont ils souhaitent décidément la fin. General Motors reste les yeux rivés sur son marché chinois et se dit prêt à liquider un constructeur historique européen. Ce sera la 4ème marque que le géant américain clouera au piloris. Pas de quoi faire le fier pour ses résultats 2011, après un tel carnage...
Rappelons une évidence : la concurrence est faite dans l'intérêt des consommateurs et non des entrepreneurs. Quand une partie use de son monopole pour supprimer les moyens de production d'une autre partie, même en ayant recours au droit le plus formel qui soit comme une clause d'ownership, alors une démocratie, un pays civilisé, ne peut pas - ne doit pas - regarder ce comportement comme licite quoique légal.
Une concurrence sur les prix, une concurrence sur les produits, une concurrence sur l'organisation d'un réseau de vente ou d'après-vente, une concurrence dans la communication, etc, etc. Cette concurrence-ci est parfois dure pour les petits, mais elle est saine et inévitable et par-dessus-tout elle peut profiter au plus grand nombre. Mais une concurrence prétextant une simple clause d'ownership ne peut pas être saine quand elle va mettre 12000 emplois sur le bas-côté au moyen d'une suppression des moyens de production - rupture de fourniture de licences - du concurrent . Nous ne laisserons pas General Motors nous couper les bras.
Ce n'est pas la concurrence et ce n'est pas l'intérêt des actionnaires de GM qui sont en jeu seulement dans l'affaire de la vente partielle de Saab à Youngman, c'est aussi une question de moyens proportionnés au dommage plausible (invoqué par GM) : au moyen d'une simple clause d'ownership, on glisse de la légitime défense à l'attaque déloyale et c'est l'ordre public ici qui est atteint dans les moyens utilisés pour mettre à genou un constructeur soixantenaire, asservi à 20 ans de tutelle avec le minimum d'investissements nécessaire pour lui imposer sa technologie et ses composants, le minimum, à croire qu'on a tout fait pour s'assurer que ce constructeur suédois ne puisse prendre son envol sans GM.
Un peu comme la marque Opel qui, elle aussi, souffre de pertes chroniques d'exploitation mais doit avoir sans aucun doute une rentabilité dans le cadre d'un bilan consolidé avec les filiales de GM lui refacturant les utilisations de licences et les composants. Opel, comme Saab est peut-être là pour gêner d'avantage ses concurrents que pour exister. C'est cela depuis le début la stratégie GM ? C'est triste pour eux, car maintenant on la connaît cette stratégie. Et il est très rare d'entendre un amateur de voitures dire que chez GM ce sont passionnés de l'automobile. Non, ce qu'on entend dire tout le temps, c'est "chez GM, ce sont des financiers". Ce sont des financiers. Je n'ai rien contre la finance (!). Mais les marchés étant structurellement rivés sur un horizon de moins de trois mois (échéances de la liquidité bancaires sur les marchés), quelle place peut-il encore y avoir pour l'automobile si la finance a le premier et absolument le dernier mot? Dommage que le gouvernement suédois qui vend si bien ses avions de chasse, des projets de 20 ans, soit si peu visionnaire sur l'intérêt d'un pays à détenir une industrie automobile haut de gamme... Dans 10 ans, ce ne seront plus les mêmes au pouvoir. Si donc nous ne faisons rien pour sauver Saab, nous le regretterons. Soyons prêts à réagir.
Ne baissons pas les bras. Il n'y a pas de fatalité. Nulla Tenaci invia est via.
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