Deux grands rendez-vous attendent encore, à quelques jours d'ici, Victor Muller et Rachel Pang, les Présidents et représentants des sociétés, respectivement Swedish Automobile (holding de Saab Automobile) et Zhejiang Youngman Lotus.
Le premier est sans aucun doute le signe fortement espéré par les actionnaires de Swan, les salariés de Saab Automobile et par nous tous : le virement des salaires de novembre et de décembre.
Dès lors que ce geste financier considérable sera initié par le chinois Youngman, je m'autoriserais à penser que Saab est pratiquement hors de danger.
En effet aucun accord solide entre Saab, Swan ou Youngman - et encore moins GM - n'est juridiquement validé à ce jour.
Plus inquiétant à court terme cette fois, la Reconstruction est toujours à la merci des juges (depuis la demande juridiquement incontestable d'arrêt de la procédure de Réorganisation par Guy Lofalk, les salaires de novembre étant toujours impayés et à ce titre considérés comme une nouvelle dette).
Si Rachel Pang et Victor Muller parviennent à un degré de confiance tel que la société chinoise ose le pas du paiement des 180 millions de couronnes suédoises promises, il ne fera plus aucun doute sur les intentions de l'investisseur chinois.
Ce transfert des fonds pourrait être très bien aussi la conséquence d'une détente avérée des discussions secrètes des parties avec GM sur un accord de plus long terme. J'ose y croire, mais j'avoue que mon sentiment sur la volonté d'extermination de Saab par GM l'emporte encore pour l'instant...:(
Parenthèse ici - Il ne faut pas oublier que même si GM n'a pas un accord à donner dans une hypothétique configuration où Youngman serait créancier et actionnaire simplement privilégié de Saab (i.e. sans part au capital social ni droit de vote), même dans ce cas où le droit les dispense de la bénédiction de GM, GM restera un fournisseur indispensable sur qui il faudra pouvoir compter et dont il faut dès aujourd'hui redouter la mauvaise volonté en cas d'accords commerciaux avec Youngman qui ne conviennent (toujours) pas au géant américain.
Pourquoi donc Youngman attend-il si tard pour payer les salaires qu'il dit vouloir payer? Pour faire plier Victor Muller? Certainement pas! VM n'a rien à négocier, car sa richesse, c'est une technologie, un savoir-faire (pour autant que les ingénieurs restent chez Saab). Sa richesse est potentielle, mais les actifs facilement cessibles de Saab Automobile se sont depuis mars dernier réduits à relativement rien face aux dettes qui sont en face...
Je repose ma question : pourquoi Youngman attend-il si tard pour payer les salaires? Parce qu'il attend un audit de Saab? Parce qu'il a peur que Saab ne réussisse pas à repartir? Non plus.
Je vais vous dire ce que j'en pense.... Je peux me tromper, mais j'ai pas mal cogité à ce sujet...
Pour une société capitalisée comme elle est et qui vit peut-être son tournant historique pour entrer dans la cour des vrais constructeurs automobiles chinois (la production de Youngman représente moins de 0.5% de la production là-bas), 20 millions d'euros sont comme 500 euros pour vous et moi.
L'enjeu est tel pour Youngman que les "quelques" dizaines de millions que la société chinoise pourrait perdre ne sont in fine relativement rien par rapport à ce que Saab représente comme potentiel de croissance pour elle. Et c'est pour cela que Youngman redoute le paiement des salaires : parce qu'alors l'aveu de "faiblesse" par rapport au géant américain sur le marché chinois sera sans équivoque et GM va pouvoir négocier comme il l'entend.
Youngman ne veut pas perdre la main si vite. Et comme j'ose espérer malgré tout que GM en secret espère que Youngman empêchera la faillite de Saab ( "on" leur doit plusieurs dizaine de millions d'euros comme fournisseur sans parler des 320 M$ d'actions préférentielles dans Saab). Youngman pourrait donc jouer avec la dernière corde qu'il a à son arc en face de GM : "Saab vivra, vivra pas.". C'est dur le monde des affaires...
Youngman redouterait donc ce moment de vulnérabilité où certes les salariés de Saab Automobile auront ce qu'ils espèrent de façon complètement légitime (dans la mesure où leur loyauté n'a pas fait défaut jusque là et Dieu sait si ce serait une catastrophe de perdre le savoir-faire pour une entreprise comme Saab), mais où GM saura alors qu'il peut aller très loin pour obtenir ce qu'elle souhaite comme condition.
Bref, le paiement des salaires est le redoutable premier défi pour Youngman et Saab, en ce sens. Mais au point où on en est, j'imagine que les intentions de Youngman sont assez évidentes et bien plus bienveillantes pour Saab qu'on ne le pense. Il reste à prendre des précautions avec GM. Et l'issue n'est pas connue : Youngman ne peut pas faire n'importe quoi non plus, c'est normal.
2ème parenthèse - De voir comment une belle société chinoise envie à souhait une société historique comme Saab Automobile, de voir qu'il faudra au-moins 3 à 4 ans pour que les chinois puissent produire des Saab en Chine, d'imaginer les efforts financiers gigantesques que cela représente et de constater en même temps que le gouvernement suédois est "incapable" d'aider convenablement son constructeur national, il faut être un économiste un peu culotté pour démontrer que l'industrie n'a pas d'avenir en pays développé... Un jour une société suédoise cherchera peut-être en Chine le savoir-faire pour implanter une usine de voiture chez elle? Qui vivra verra...
De ce premier défi découle le second rendez-vous dont nous parlait cet après-midi TTELA.SE :
Saab a demandé et obtenu au Tribunal de Vänersbourg le report d'audience du 16 au lundi 19 décembre. Cette audience programmée doit permettre aux juges d'entendre les parties concernées par la Reconstruction (les représentants des créanciers, des investisseurs et les actionnaires de Saab Automobile) expliquer comment celle-ci peut continuer - c'est-à-dire avec quels moyens financiers - et surtout en vue de quoi - c'est le business plan de Saab Automobile.
Le moins qu'on puisse dire, c'est que les juges ne souhaitent pas endosser la responsabilité des 12 à 15000 emplois qui seraient directement menacés par une éventuelle faillite de Saab. Et ils se sont montrés très à l'écoute des problèmes concrets rencontrés par Youngman et par Saab.
Le Tribunal de Vänersbourg convoquera aussi l'admisnitrateur Guy Lofalk qui rendra son rapport. Les représentants des créanciers seront entendus.
Il ne fait aucun doute que si les fonds - les salaires plus un complément - ne sont pas versés par Youngman, Saab ne sera pas en mesure de présenter valablement une poursuite de la procédure de Réorganisation lundi 19 décembre prochain. Mais si les fonds sont arrivés, il restera la tâche délicate au managament de Saab et de Youngman de présenter un business plan sur la base d'un protocole d'accords financiers qui cette fois sont réellement viables. En l'absence de GM, difficile de trancher pour la Cour... Lundi prochain si les salaires auront été payés, le fantôme américain s'invitera aux débats. Gageons que les juges suédois se montreront compréhensifs compte-tenu des risques importants pris par Youngman.
Et maintenant, il faut attendre le paiement des salaires qui sera le geste de négociations presque abouties entre les parties et le chinois Youngman. Une fois cela fait, le rendez-vous de lundi devrait bien se passer si nous en croyons Victor Muller et Rachel Pang, la représentante de Youngman.
Si tout va comme on l'espère, il restera le délibéré des juges concernant la poursuite de la Réorganisation à la suite de l'audience de lundi prochain et la poursuite des négociations pour aboutir enfin à un accord... Et il sera peut-être à ce moment le 15 janvier, ma fête... La fête de tous les saabistes... Enfin, ne rêvons pas trop. Attendons ce deuxième transfert de fonds. Et là, on pourra recommencer à écrire avec des "et si..."
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