Née en 1959, l’Austin Mini était l’œuvre du génial Alec Issigonis. Cette petite citadine ô combien intelligente était nantie d’un rapport habitabilité/encombrement surprenant et de qualités routières non moins étonnantes, lui permettant de tenir tête, malgré sa mécanique modeste, à des autos nettement plus puissantes. Conscient des capacités de cette puce, des pilotes amateurs engagèrent rapidement l’auto dans des épreuves sportives, faisant mieux que de la figuration. Mais c’est en 1961 que les choses sérieuses vont réellement commencer avec l’apparition, grâce aux accords passés avec John Cooper, des versions Austin ou Morris Mini Cooper. Equipée d’un 1000 cm3 de 55 chevaux, la Cooper évoluera rapidement jusqu’à 1275 cm3 et près de 80 ch...
Au milieu des années soixante, ces petites bombes se forgeront un palmarès impressionnant (voir plus bas) et posséderont de nombreux amateurs. Au même titre que la Coccinelle ou la 2 CV, la Mini fait partie de ces voitures que l’on a l’impression d’avoir toujours connues, et que l’on revoit avec plaisir. De fait, sa large diffusion (l’auto a été produite durant plus de quarante ans à cinq millions d’exemplaires) la rend encore assez présente sur nos routes, et surtout dans nos agglomérations.
Mais les Mini que l’on croise sont le plus souvent en triste état : dotées d’une faible valeur marchande, elles demeurent généralement des occasions à petit budget, avec un entretien en rapport...
Adulée
Depuis de nombreuses années déjà, les versions Cooper présentent un cas à part : bénéficiant d’un traitement de faveur de la part des amateurs chérissant ces attachantes bombinettes, elles n’ont connu qu’une courte traversée du désert.
Du reste, l’état de conservation de cette auto n’est pas dû au hasard. Notre Innocenti d’un jour se présente dans une robe verte – teinte spécifique Innocenti – immaculée, et son intérieur d’origine est tout aussi bien conservé.
Au même titre que les Simca 1000 Rallye 2 ou R8 Gordini, ces autos déchaînaient à l’époque des passions que le temps n’a pas émoussées. Plus près de nous, les Peugeot 205 ou 309 GTi, voire les Renault 5 GT Turbo ou 21 2 L Turbo sont déjà, malgré leur « jeune » âge – une vingtaine d’années tout de même – appréciées par des inconditionnels souvent réunis dans le cadre de clubs.
Vivifiante
La portière s’ouvre largement, dévoilant un habitacle accueillant malgré les dimensions extérieures très compactes de l’auto. Le conducteur a devant lui une planche de bord complète et résolument sportive, qui comporte un compte-tours dont les versions anglaises avaient été toujours privées. Comme sur la version originelle, les principaux instruments sont placés au centre du tableau de bord. Moquette au sol, bandeau central des sièges garni de tissu, déflecteurs, l’habitacle est correctement fini : sportive, l’Innocenti n’en accueille pas moins ses occupants avec un minimum de confort.
Déjà à température, le moteur démarre au quart de tour. Au point mort, quelques coups d’accélérateur dénotent d’emblée un caractère affirmé : malgré sa cylindrée mesurée, la mécanique semble posséder de la ressource, et l’aiguille du compte-tours ne se fait pas prier lorsqu’on taquine la pédale de droite. Coup d’œil dans le rétro, la voie est libre, c’est parti !
L’Inno bondit avec vivacité, la démultiplication courte permet de monter rapidement les rapports et le couple conséquent à mi-régime autorise de bonnes accélérations tout en restant aimable avec le compte-tours. Le long levier de vitesses aurait certes pu être plus précis (on est bien loin du « remote control » d’une Triumph TR), mais la boîte reste maniable et la synchronisation est bonne. On retrouve immédiatement la diabolique maniabilité de la Mini, son aspect de gros kart d’ailleurs renforcé par la position très verticale de la colonne de direction. Une direction à crémaillère qui permet de placer l’ensemble au millimètre, même si sa grande sensibilité au point zéro demande accoutumance.
Malgré la compacité de l’auto, l’empattement maximal – les roues sont rejetées aux quatre coins – permet au châssis de conserver une stabilité de bon aloi. Bien campée sur ses trains roulants, l’Innocenti file bon train sur cette route sinueuse, négociant les courbes avec une désarmante facilité.
Piège à permis
Après quelques kilomètres à ce rythme, le propriétaire assis à mes côtés m’engage à augmenter la cadence. J’écrase cette fois-ci l’accélérateur sans ménagements. Dans un grondement rageur, la mécanique ne se fait pas prier et les accélérations deviennent rageuses. Toutefois, passé le cap des 5000 tours, le moteur s’assoit un peu : la rondeur aux régimes usuels a manifestement été privilégiée par rapport au rendement maximal. Il est vrai que nous sommes en présence d’un bloc longue course, une architecture qui ne favorise pas vraiment les hauts régimes... Cependant, pour les pilotes vraiment pressés, il existait – et il existe encore – une multitude de pièces spécifiques donnant davantage de nerf... pas toujours, pour les évolutions les plus ultimes, au bénéfice de la fiabilité. Mais telle qu’elle se présente, l’Innocenti Cooper permet d’évoluer sur ces routes sinueuses à des allures susceptibles de déplumer votre permis en moins de temps qu’il n’en faut pour l’écrire.
L’autre sujet d’étonnement provient du freinage : alors que c’est ce point qui date le plus les autos des années 70, le système ne souffre ici d’aucune critique : dotée de plaquettes plus tendres il est vrai, l’auto se tasse sur son train avant et ses capacités de décélération sont proportionnelles à celles de ses accélérations... Même un freinage appuyé en courbe ne désunit pas ce bel ensemble, et on comprend qu’à l’époque des pilotes confirmés, à l’image de Makinen, Hopkirk ou Aaltonen, pouvaient signer des temps explosifs dans les spéciales. Pour notre part, nous reconnaissons avoir le plus souvent sous-estimé les possibilités de ce petit monstre, anticipant d’instinct des déhanchements ou autres dérives qui n’avaient pas lieu ici.
Tout d’une grande
Mais si la Cooper s’est révélée une extrapolation sportive très performante, une Mini c’est avant tout un rapport encombrement/habitabilité peu commun. Malgré la petite taille de l’engin, on dispose à son volant d’une bonne aisance, avec en particulier une largeur aux coudes appréciable. A l’arrière, l’espace est également valable, deux adultes pouvant même supporter un trajet normal sans trop de contorsions. Certes, les suspensions sèches n’offrent pas à cette Cooper un confort de grande routière, mais l’amortissement reste correct et, pour tout dire, nous nous attendions à être davantage chahutés sur cette route au revêtement inégal.
A l’image d’autres populaires de la même époque, la Mini était souvent la première voiture d’un jeune couple, et se devait d’offrir un rapport prix/service maximal. Les premiers dépliants publicitaires présentaient d’ailleurs les Austin Seven ou Morris Mini Minor comme des petites familiales avec généralement, à son bord, un couple et des enfants manifestement ravis d’avoir accédé à l’automobile...
Lorsqu’on observe les formes harmonieuses et parfaitement logiques de cette carrosserie, on peut toutefois regretter qu’Alec Issigonis n’ait pas été plus loin dans l’aspect pratique de sa petite auto en l’équipant d’un hayon, alors que son coup de crayon initial s’y prêtait parfaitement. Il est vrai qu’un tel accessoire n’était pas courant à la fin des années cinquante, mais, conjugué à une banquette rabattable, il aurait pallié à la petitesse du coffre à bagages. De toutes façons, il était objectivement difficile de faire mieux dans trois mètres de long...
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