Combien de bêtises ont-elles été écrites (puis répétées...) sur les Ferrari Mondial ! A en croire les prétendus connaisseurs, cette lignée n’est pas digne du blason qu’elle porte. Certes, la première Mondial 8 apparue en 1980 n’était pas exempte de tous reproches, loin de là. Mais il ne faut tout de même pas oublier la vocation clairement grand tourisme et presque familiale de cette Ferrari. On imagine mal en effet sortir la grosse attaque au volant avec les enfants derrière. Pour ce type de conduite, les berlinettes contemporaines comme les 308, puis les 328, étaient plus désignées. En outre, Pininfarina avait réussi avec les honneurs à imaginer une ligne élégante et sportive en conjuguant les données du cahier des charges qui étaient antinomiques : une 2+2 avec moteur central arrière. Bertone avec la Dino puis Ferrari 308 GT4 n’avait pas eu cette chance… Après quelques évolutions notables comme un moteur multisoupapes en 1983 avec 26 ch de plus, un cabriolet l’année suivante tant attendu aux USA et les marchés porteurs ensoleillés, puis enfin un nouveau V8 de 3,2 litres et 270 ch comme sur les 328, la Mondial semblait avoir trouvé la bonne formule. Mais c’est au salon de Genève 1989 que Ferrari mit une touche finale à « l’édifice » Mondial. La nouvelle Ferrari 348 va en effet profiter des multiples évolutions majeures de la Ferrari Mondial. Si la ligne reste similaire à de nombreux détails près, la Mondial T est véritablement une toute nouvelle voiture ce qui finalement la met un peu à part dans la généalogie Mondial. « T » la bonne ? Assurément…
Dessinée il y a presque 25 ans
Toujours sous la coupe de Pininfarina, le dessin de la Mondial n’a qu’évolué avec le temps par petites touches. Le plus gros changement interviendra avec la Mondial 3.2 qui héritera notamment de boucliers avant et arrière plus carrés et peint dans la couleur de la carrosserie. Ils sont ainsi alignés au niveau style avec la Ferrari Testarossa. Fini donc les gros pare-chocs en plastique noirs à l’élégance toujours discutable. Si les jantes en alu restent identiques en dessin (toujours 5 branches et 5 goujons) elles ne sont plus chaussées de pneus Michelin TRX. Toujours des évolutions dans les détails, les poignées de portes extérieures sont désormais partiellement peintes couleur carrosserie et les prises d’air latérales sont plus petites et plus carrées.
A l’arrière, le petit monogramme « Mondial t » permet d’identifier pour le profane une « T » des autres modèles de la saga Mondial. Les deux double sorties d’échappement sont là pour rappeler qu’un V8 est tapi sous le capot arrière. Les phares escamotables, stigmates des voitures de sport des années 70 et 80 offre désormais un bloc optique carré par phare contre des doubles optiques rondes auparavant. Lorsque l’on observe la Mondial T cabriolet avec du recul, on lui trouve même des similitudes avec la 348. Pas étonnant puisque c’est également l’effet recherché. Il est indéniable que la Mondial la plus désirable est la T en cabriolet. Le côté un peu lourd du coupé avec un pavillon allongé est ici oublié et la ligne de la Mondial T cabriolet est de toute beauté. Sur la poupe, on retrouve ces quatre petits feux ronds indissociables des Ferrari des années 70 et 80. C’est à bord de la Mondial T que les différences semblent finalement les plus nettes. Les sièges sont légèrement redessinés, ainsi que la planche de bord qui gagne en noblesse de ligne. Tous les compteurs et manomètres sont désormais regroupés derrière le volant dans un bloc d’instrumentation unique. La similitude avec la 348 est d’ailleurs frappante. La planche de bord a été également redessinée globalement ainsi que les contreforts de portes qui sont retravaillés afin que la nouvelle planche de bord puisse mourir sur les portes avec harmonie. Si la finition et surtout la présentation semblent avoir progressé, la qualité n’est toujours pas au rendez-vous avec des vieillissements prématurés de certains plastiques.
Dommage, surtout au prix affiché à l’époque (664.000 francs pour un cabriolet soit environ 110.000 euros !). L’équipement de série était complet pour l’époque avec la centralisation des portes, les quatre vitres électriques, la climatisation. En revanche, en bon cabriolet italien des années 80-90, ne cherchez pas la capote électrique, elle n’existait pas, même au catalogue des options ! Le point fort de cette Mondial est évidemment d’offrir deux petites places d’appoint à l’arrière qui peuvent, comme sur les Porsche 911, se muer en espace pour mettre des bagages si vous rabattez les dossiers. L’accès à bord pour les places arrière n’est pas des plus aisés, mais en étant décapoté, tout semble plus simple.
Une fois installé au volant, on goûte à la position de conduite de cette Ferrari dont le succès en cabriolet ne se dément pas, surtout en jaune vif ! Inutile de vouloir passer inaperçu tant les badauds nous regardent. La séance photos aux abords du château de Vincennes sera l’occasion de nombreux contacts. Sous la main droite, la traditionnelle grille Ferrari brille avec les reflets du soleil et fait partie intégrante de la magie Ferrari, jusqu’à ce que récemment les boîtes F1 robotisées s’imposent progressivement.
300 chevaux
made in Maranello
Si les premières Ferrari Mondial 8 faisaient pale figure avec leur V8 de 3 litres de seulement 214 ch, la saga Mondial a été nettement améliorée pour atteindre 270 ch avec les 3,2 litres et l’augmentation de cylindrée. Une puissance enfin « respectable » à même de tenir en respect notamment les Porsche 911 Carrera 3.2, puis les 964 C2. Car ne l’oublions pas, sa rivale allemande possédait alors (et c’est toujours le cas) une image en béton et très enviable, un concept 2+2, des performances aussi bonnes et surtout un tarif plus abordable.
N’est pas Ferrari qui veut, on vous le concède, mais un blason aussi prestigieux se doit de se battre avec le « haut du panier ». Avec la Mondial T, c’est la révolution sous le capot moteur. Si l’ancien V8 était disposé transversalement, il est désormais longitudinal. En revanche c’est la boite de vitesses qui devient transversale et qui donne ainsi son « T » à la Mondial.
C’est un clin d’oeil aux Ferrari de F1 des années 70, les 312 T qui remportèrent de nombreux succès aux mains de Niki Lauda et Clay Reggazoni. Puisque la cylindrée est augmentée, le bloc tout alu est nouveau avec désormais 3405 cm3 et 32 soupapes. L’implantation mécanique a permis d’abaisser au maximum le centre de gravité (la nouvelle implantation de la boîte a permis de descendre le moteur de 13 cm) et la lubrification à carter sec procède de la même logique tout en évitant tout déjaugeage lors des appuis en courbe. L’injection Bosch Motronic est appelée en renfort pour gérer l’alimentation de cette brillante mécanique tandis que des tubulures d’admission de longueurs inégales ont été montées pour améliorer le fonctionnement et la souplesse à bas régimes. On notera un allumage sans distributeur à quatre bobines et deux double arbres à cames en tête pour mieux illustrer la haute noblesse et technicité de cette brillante mécanique. Une mécanique qui fait penser à celle de la Ferrari 348 TB/TS ? Normal c’est la même ou presque ! Sous votre pied droit vous pouvez donc gérer cette symphonie italienne avec 300 ch à 7200 tr/mn et 32,8 mkg à 4200 tr/mn. Toujours aux commandes, la commande de boîte avec sa longue tige et sa grille. Une boîte au maniement difficile et viril, à froid notamment, et qui peut lasser dans les conditions urbaines.
Contact !
le moteur émet un feulement très sympathique. Pas de doute, c’est bien un V8 Ferrari qui est dans notre dos. Une fois les manos aux bonnes températures, on peut aller chercher les hautes rotations et tester les différents registres de ce V8 italien. Près de 260 km/h en vitesse maxi, mais surtout des accélérations de premier ordre avec 26 secondes au kilomètre départ arrêté et 6,3 secondes au 0 à 100 km/h.
Cheveux au vent, voilà des chiffres qui causent et qui restent encore actuellement à l’abri de n’importe quel diesel un peu puissant. Le travail sur le moteur l’a rendu nettement plus agréable en usage quotidien avec plus de souplesse en bas dans les tours, tandis que dès que la route se dégage, les oreilles prêtes, vous pouvez démarrer votre composition en 8 majeur.
Un châssis très amélioré
Les premiers utilisateurs de Mondial 8 avaient connu quelques frayeurs. Avec son moteur central arrière, son empattement long et sa faible puissance et reprises à bas régimes, la Mondial s’était avérée nerveuse vers les limites et délicate à rattraper, notamment à l’improviste faute de muscle moteur disponible instantanément. Les multiples évolutions ont considérablement amélioré sa tenue de route en repoussant notamment les limites du décrochage. Avec la nouvelle Mondial T, Ferrari est allé encore plus loin dans la démarche d’amélioration et a notamment travaillé sur la recherche d’un compromis confort/facilité et sport. Il était en effet temps que tout le monde se rappelle que même une Mondial, avec son Cavallino Rampante sur le capot est avant tout une vraie voiture de sport, aussi familiale soit-elle ! Une suspension à amortissement piloté avec des combinés Bilstein (un système similaire à celui monté sur la Porsche 959 ou la Corvette ZR-1, excusez du peu !) et doté de trois lois d’amortissement : souple pour le « confort », « moyen » et « ferme ». Il suffit d’opter pour le degré de fermeté de votre choix du bout d’un doigt à l’aide d’un bouton sur la planche de bord.
Cela autorise ainsi la Mondial à être conciliante pour un usage courant. Avec en prime sa direction (trop ?) assistée, on est assis dans une Ferrari des années 80 presque facile à conduire ! Il suffit de monter ensuite dans une 348 TB sans direction assistée pour comprendre ce que cela signifie… Mais dès que le rythme s’accélère, on retrouve l’instinct du pilote en oubliant que les places arrière sont occupées en optant pour le mode ferme. Et là, l’auto devient plus précise. En revanche, malgré l’accroissement des renforts de carrosserie (40 kg de plus que le coupé) avec le pare-brise qui joue le rôle d’arceau, la rigidité est vite mise à mal et on sent très nettement la caisse qui travaille. A part pour des autos qui ont été conçues au départ comme des cabriolets (comme la Ferrari F50 pour prendre un exemple extrême dans la même marque), on est toujours confronté à ces problèmes de rigidité structurelle. Rassurez-vous, cela n’est perceptible qu’à un rythme que peu de conducteurs emploient…
Cela ne pourrait constituer un frein à l’achat, une Mondial T cabriolet n’étant généralement pas retenue pour arsouiller chaque week-end sur circuit. Si le rythme augmente, Ferrari a pensé à vous avec le recours à quatre disques ventilés et complétés de série d’un antiblocage ABS Teves. Le plus gros « piège » avec la Mondial côté châssis c’est son équilibre très marqué sous-vireur qui une fois les limites atteintes se transforme soudainement en survirage brutal. On est tout de même pas au même stade que les Alpine GTA V6 Turbo, mais dans l’esprit c’est similaire. Si vous ne possédez donc pas un bagage de pilotage minimum, et que la route ne s’y prête pas, on vous déconseille fortement de jouer avec ses limites et surtout, avec les vôtres... Pour terminer avec la partie châssis, voyons les pneumatiques. Exit les antiques TRX au bout des roues alu frappées du cheval cabré ! Désormais c’est du 205-55 ZR 16 à l’avant et du 225-55 ZR 16 à l’arrière qui offre également une adhérence de premier ordre. Puis, lorsque votre chemise a décidé d’être assez froissée, vous pouvez revenir à un rythme plus propice à la balade sur les bords de la « French Riviera », décapoté cheveux au vent, avec les réverbérations du feulement du V8 Ferrari sur les parois rocheuses et vous qui jouez du double débrayage avec la grille en alu. Décidément, la Mondial T cabriolet offre un caractère et une polyvalence que peu de Ferrari désormais anciennes peuvent donner.
Acheter
une Ferrari Mondial t
La Ferrari Mondial T cabriolet attire les connaisseurs. Elle est en effet la dernière Ferrari décapotable à 4 places du marché, puisque depuis seuls les spiders ont la belle vie à Maranello. La seule quatre place dans la gamme 2007 est la 612 Scaglietti qui n’existe qu’en coupé et joue pas réellement dans la même cour que la Mondial. La première joue en haut en tarif et avec son V12, la plus âgée est dans le V8 et presque abordable. Il ne faut donc pas s’étonner que sa cote soit la plus élevée dans la saga des Mondial. Comptez environ 45 000 euros pour acquérir un modèle entretenu et en bon état. Cela peut parfois être plus en l’achetant chez un professionnel (voir encadré pages suivantes). Plus récentes que ses soeurs Mondial 8 ou Quattrovalvole, la Mondial T souffre moins d’historiques troubles et amnésiques. Pourtant, même une Mondial T doit avoir un carnet d’entretien à jour et des factures régulières correspondant aux intervalles de maintenance prévus par Ferrari. Si le modèle convoité en est dépourvu, même s’il semble beau, fuyez ! Le coût d’entretien et réparation pouvant vite dépasser cote de la voiture, cette donnée est certainement la plus importante à respecter lors de la phase de recherche et d’achat. Nous avons l’impression de nous répéter, mais pour les voitures de sport haut de gamme, et les italiennes prestigieuses en particulier, c’est une donnée vitale pour la santé à venir de votre compte en banque.
L’auto devra avoir eu des courroies remplacées fréquemment, et cela est à vérifier sur une Mondial T plutôt deux fois qu’une car toute intervention mécanique se solde immédiatement par une dépose ou un démontage partiel du moteur ce qui a parfois fait reculer certains anciens propriétaires faute de moyens. Prévoir une vidange d’huile moteur tous les 10 000 km ou chaque année avec de la 10 W 40 (10 litres tout de même !), avec remplacement du filtre à chaque vidange. Les Mondial T étant équipées de carter sec, niveaux et vidanges ne sont donc pas à la portée du premier venu…
Comme tout système évolué, la Mondial T disposant d’amortisseurs Bilstein à amortissement variable, en cas de remplacement, le coût est hélas supérieur à un système plus classique comme sur les Mondial 8 ou Quattrovalvole. La Mondial T peut aisément être assuré en collection ou par le biais de courtiers spécialisés sur les voitures prestigieuses, ce qui permet de ne pas trop laisser d’argent en prime d’assurance. L’autre bonne nouvelle est l’abandon des pneus TRX, coûteux à l’achat et à l’approvisionnement compliqué aujourd’hui. Lorsque l’on regarde les compteurs, les Mondial T cabriolet ont souvent peu tourné et affiche généralement des kilométrages inférieurs aux 100 000 km. Si l’auto est bien entretenue et que les précédents propriétaires respectent scrupuleusement les temps de chauffe, le V8 est fiable et peut largement dépasser les 150 000 km. La plus grosse faiblesse provient souvent d’une immobilisation des Ferrari qui roulent peu voire plus du tout avant d’être revendues. Les durits, flexibles, rotules, silent-blocs et électricité vieillissent parfois prématurément et il ne faudra pas hésiter à passer par une bonne révision. Vous l’aurez compris, on ne cherche pas à vous dissuader d’acheter une Mondial T, mais plutôt de vous mettre en garde. L’achat d’une telle auto ne peut être que la concrétisation d’un rêve mûrement réfléchi et ne doit pas être un second choix faute de moyen suffisants pour acheter un autre modèle dans le catalogue de Maranello. Les coûts d’entretien et réparations peuvent vite s’envoler et dépasser très largement la cote de la voiture. Posséder une Mondial T cabriolet ne peut donc être avant tout qu’un choix passion lucide et une vraie envie de rouler en Mondial. Pour les autres, passez votre route car les dépenses seront vécues comme un sacrifice et non un souhait de maintenir en état une 2+2 italienne à la renommée pas toujours au top…
Conclusion
Si les néophytes et béotiens critiqueront avec aise la Ferrari Mondial en voyant une « T », c’est avant tout un aveu d’inculture automobile et surtout de méconnaissance de la marque de Maranello. La Ferrari Mondial T cabriolet est une sorte de requiem de la gamme Mondial, en corrigeant presque tous ses défauts de jeunesse et en apportant un compromis rare entre sport et confort, polyvalence et performance, élégance et pratique (pour une voiture de sport s’entend). Alors certes, le blason jaune au cheval noir a toujours son revers de la médaille côté budget, mais la magie demeure intacte surtout en cabriolet et que ne serait-on pas prêt à faire pour une belle italienne ? Et l’amateur éclairé saura lui en acquérant une Mondial T cabriolet qu’il possède là une Ferrari unique dans la généalogie du constructeur italien, dont la genèse remonte au temps où le Commendatore était encore aux commandes et dont l’offre sur le marché n’existe plus à Maranello depuis longtemps déjà…
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