Véritable icône automobile pour toute une génération de baby-boomers, la Mustang a fait rêver la jeunesse d'Amérique et bien au-delà de sa terre natale. Incarnation de "l'american way of life" et voiture des stars en Europe, la Mustang est une belle quadragénaire encore pleine de charme... En 1967, Johnny Hallyday chantait sur son album Johnny 67 "Je m'accroche à mon rêve". Un titre qui illustre bien ce qu'incarne cette Ford Mustang à l'époque pour tous les amoureux d'automobile. 1967, c'est l'année de naissance de notre belle américaine toute de turquoise vêtue. Les jeunes de la génération Baby-Boom d'après-guerre profitent au maximum d'un pouvoir d'achat rarement égalé dans une Amérique prospère où l'idée d'un choc pétrolier à venir n'est encore qu'une vision de science fiction. Dans cette deuxième moitié des années 60, les hippies se font entendre et un grand vent de liberté souffle sur l'Amérique qui refuse la guerre au Vietnam. La Ford Mustang a marqué le début d'une ère nouvelle dans l'Histoire de l'automobile, elle est le symbole d'une jeunesse dynamique et décomplexée, avide de plaisirs...
Une ligne
devenue indémodable
Le 17 avril 1964 est une date mémorable : ce jour là, Ford, second constructeur mondial, présente à la foire mondiale de New York sa Mustang. Ford a inventé l'automobile pour les jeunes américains, en rupture avec les grosses berlines paresseuses. Le concept de "Pony-car" est né : une voiture de "petite taille", basse, et dont l'habitacle est reculé pour laisser place à un long capot et un profil élancé. Pourtant, la Ford Mustang est conçue initialement comme un roadster bi-place, à travers un concept car présenté en 1962 au salon de Genève. Mais Lee Iacocca, designer en chef très apprécié de Henry Ford II, décide de remanier le projet pour en faire une quatre places et toucher une plus large clientèle.
Le succès est immédiat, la Mustang qui devait être construite à 100.000 exemplaires, sera finalement produite à 700.000 unités pour le premier millésime, entre avril 1964 et août 1965 ! Notre modèle de 1967 est la première version retouchée de la Mustang première génération, et sera produite de 1967 à 1969. Coupé classique comme la Mustang originale, par opposition au "Fast Back" proposé dans la gamme depuis 1965, cette version 289 de 1967 se "virilise" dans ses lignes et dans ses moteurs. C'est d'ailleurs de cette évolution, en version fastback, que la Mustang 2005 semble la plus inspirée. Les faces avant et arrière sont les principales modifications pour 1967 mais le dessin reste assez proche de l'original, tout en ajoutant une touche d'agressivité supplémentaire. La calandre avant est plus proéminente, elle se détache des phares et ajoute un peu de longueur au capot. A l'arrière, la poupe creusée et les triples feux vont faire date. On note aussi les entrées d'air (factices !) apposées sur les ailes arrières, mais que l'on pouvait faire supprimer en option. Plus longue de quelques centimètres pour atteindre 4,66 m au total, plus large de 10 cm avec 1,80 m, mieux posée sur des voies élargies, la Mustang se démarque également à l'époque par une longue liste d'options ainsi qu'un prix de vente très attractif en regard des performances proposées. A noter que notre modèle dispose des jantes GT, qui faisaient partie du pack GT en 1969, mais pas du fameux package complet. 40 ans et pas une ride, cette Mustang est une quadra en pleine fleur de l'âge, encore bien décidée à donner du plaisir. Plaisir visuel tout d'abord, car sa ligne emblématique accroche toujours autant le regard des passants. Comme à sa sortie, on se retourne sur elle, comme sur une star de cinéma qui a traversé les époques et les modes sans rien perdre de son charme naturel. Le photographe se délecte, à la lumière tombante d'une journée de printemps, notre Mustang prend la pose comme jadis, exhibe tous ses chromes. Sa robe turquoise typique des années 60, ne gâche en rien le spectacle, bien au contraire, surtout devant le jaune éclatant des champs de Colza.
À l’intérieur,
le dépaysement est assuré
Passons maintenant à l’habitacle où le turquoise domine encore, du sol au plafond. Le volant tulipé avec sa jante en bois et ses branches percées en chrome est une véritable invitation à la conduite, typique des années 60-70.
La présentation est celle des belles américaines, avec du simili cuir, des chromes et des rappels de teinte de carrosserie, mais la finition trahit les efforts faits sur le prix. Enfin rien de bien méchant, surtout qu'une Ferrari n'offrait guère mieux à l'époque et coûtait pourtant bien plus cher ! Au niveau de la position et du confort de conduite, la Mustang est très "vintage", jambes allongées, bras pliés et volant sur le ventre. Les sièges accusent un manque de maintien quasi total, tandis que la ceinture qui ne boucle que le ventre, invite, elle, à la prudence...
Au-dessus de la colonne de direction peinte couleur carrosserie, le compte-tours et le compteur de vitesse sont incrustés dans une planche de bord délicieusement "rétro" aussi, avec des boutons assez mal placés. Cet habitacle nous transporte dans une autre époque, et le voyage ne manque pas de nous dépayser. Assis bas, on survole la route avec ce long capot qui s'étale vers l'horizon. Incrustés dans le bossage du capot, des répétiteurs de clignotants remplacent un indicateur défaillant au tableau de bord. C'est le genre de détail qui amuse et surtout participe au charme de rouler dans une telle voiture. Quelques options étonnantes étaient proposées dont une colonne de direction "tilt away" qui se décale automatiquement vers la droite lors de l'ouverture de la porte conducteur, ou encore le "cruise control", ancêtre de nos régulateurs de vitesse électroniques, agissant seul sur la pédale d'accélérateur pour maintenir la vitesse entre 40 à 130 km/h. Si la Mustang incarnait à l'époque la vitesse et la compétition, nous nous contenterons pour notre part de promener la belle en se délectant des gargarismes camionesques de son V8.
Un moteur à la
puissance... américaine !
Ce V8 justement, parlons-en. La Mustang 289 ci (rapport à la cylindrée unitaire en "cubic inches" du V8) se positionne en milieu de gamme, au-dessus des versions d'attaque équipées du 6 cylindres en ligne 2.8L de 115 ch et 120 ch. Ce V8 289 va représenter le gros des ventes. Le V8 4.7L à carburateur 4 corps Autolite 4100 développe donc pour sa part 228 ch SAE à 4800 tr/mn. On trouve aussi au-dessus la version 289 "HP", qui n'a ici rien à voir avec 289 "Horse Power" ! En effet, une option HP pour "Hi-Power", correspondant au code moteur "K", permettait de faire grimper la puissance du V8 289 ci à 271 ch SAE à 6000 tr/mn. Ces versions sont rarissimes au millésime 67, moins de 500 ont été fabriquées. Enfin, en haut de gamme, le gros V8 390 ci de 320 ch SAE fait son apparition en 1967.
Il faut savoir aussi qu'avant 1971, la norme SAE (pour Society of Automotive Engineers) utilisée aux USA exprime la puissance "brute" du moteur, c’est à dire en sortie de vilebrequin, et donc démuni de tous ses "périphériques" : transmission, roues, alternateur, ventilateur de refroidissement, silencieux d’échappement etc... Evidemment flatteuse pour le marketing, cette norme masque aux clients que les chiffres annoncés sont souvent très éloignés de la réalité, jusqu'à 25% de moins pour certains moteurs ! Cet honnête 8-cylindres en V tout en fonte à arbre à cames latéral est accouplé sur notre modèle à une transmission automatique "Cruise O-Matic" à 3 rapports qui disperse rien qu'à elle une bonne partie de la puissance fournie. Malgré tout, le gros V8 culbuté vous transporte toujours aussi facilement. Flash back dans les "sixties", nous emprunterons les petites routes, plutôt que les "highways". Réglez le tuner sur radio Nostalgie. Ça y est, vous êtes ? C'est parti ! Le temps de faire chauffer la mécanique, nous profitons des 40 Mkg de couple, l'oreille captivée par les glougloutements évocateurs du V8. Quelques occasions pour pousser un peu le moteur et faire ronfler le double échappement en inox permettent de cerner à la fois le poids conséquent de l'auto et la puissance imaginaire qui l'anime.
En effet, côté performances, on reste malgré tout un peu sur sa faim. Le moteur n'aime pas spécialement les tours et malgré une sonorité merveilleuse, le cheval sauvage a des allures de Percheron. Il convient de prendre un certain recul face à cette quadragénaire qui est aux antipodes de ce qu'on attend d'une voiture de sport moderne. Malgré tout, même si tous les chevaux ne sont pas là (on peut supposer que le moteur en fournit réellement 200 ch au banc), avec peu d'efforts on pourra tutoyer près de 190 km/h en pointe.
Il y a près de 40 ans, lorsque la vitesse était libre et qu'on risquait moins son permis que sa vie sur les routes, c'était déjà bien plus que la majorité des voitures de série ! Bien qu'elle se fasse accrocher par la première petite GTi venue et qui n'aurait pas le respect dû à notre Mustang, reprises et accélérations se montrent assez satisfaisantes (moins de 10 secondes pour passer de 0 à 100). La Ford Mustang s'imposait à l'époque alors comme une voiture performante et abordable, une base idéale pour les amateurs de course automobile. Petite pause, il est déjà temps de refaire le plein ! C'est que le réservoir n'est pas énorme (65 litres) et la jauge imprécise n'incite pas à risquer de continuer sur la réserve. En conséquence, l'autonomie se montre plutôt réduite en raison d'une consommation moyenne qui tourne ne descend pas sous les 20 litres au 100 km... Un bidon d'additif plus tard, pour ne pas encrasser le gros carbu, et nous revoilà prêts à reprendre notre balade.
Un châssis
d’un autre temps
La plupart des éléments de châssis de la Ford Mustang sont hérités des
Ford Falcon et Fairlane. Une suspension avant indépendante par ressorts hélicoïdaux et un antique essieu rigide à l'arrière contrôlé par une paire de ressorts à lames, déjà bien démodés dans les années 60, sont donc chargés de maintenir le cap de cette authentique américaine, accrochée au bitume tant bien que mal via 4 roues de 14 pouces. Sur petite route, la direction à billes (moins démultipliée à partir de 67) non assistée se montre assez imprécise, tandis que le premier gros freinage après une forte accélération a de quoi vous lancer des sueurs froides ! Diable, il y a pourtant des freins à disque à l'avant mais il vaut mieux anticiper au maximum !
Les commandes sont fermes, et encore, nous disposons de la boîte automatique qui évite d'avoir à se muscler le molet gauche sur la pédale d'embrayage. Petit transfert de masses avec un gauche droite à bonne allure, la caisse tangue gentiment. Aie, le poids des ans est finalement plus cruel qu'il n'y parait et notre légende roulante a bien du mal à afficher le caractère sportif tant vanté autrefois. Enfin, disons qu'elle demande l'art et la manière. Sous la pluie, un dérapage imprévu peut vite arriver, et vu la trop grande démultiplication de la direction, le contre-braquage n'est pas des plus aisés ! Si déjà une 911 de 1967 exige un certain talent de pilote pour être menée vite, que dire de la Mustang... Dès qu'on la bouscule un peu, l'essieu arrière redonne au cheval sauvage tout son sens ! Et les fans de la Mustang n'auraient pourtant avoué que sous la torture qu'au plan dynamique il y avait quand même à redire. Les nombreuses victoires de la Mustang en sport automobile (notamment au Tour de France Auto), tendent pourtant à leur donner raison. D'ailleurs, pour les vrais amateurs de conduite sportive, Ford proposait avec le V8 289 HP un "competition handling package", option très rare et très chère, associée à l'option "GT equipment group" et comprenant des freins à disques (mais freinage non assisté), des ressorts plus raides, des amortisseurs réglables, une direction plus directe, une barre stabilisatrice de plus gros diamètre et un différentiel à glissement limité en plus de quelques éléments stylistiques propres. Ainsi dotée, la Mustang pouvait revendiquer une tenue route plus en accord avec la puissance de son V8 "Hi-Power". L'option GT, chère et inutile pour beaucoup d'acheteurs américains, était en revanche très demandée en France. Loin de pousser notre exemplaire dans ses derniers retranchements, nous maintenons un rythme de croisière bucolique, vitre ouverte et coude à la portière pour savourer les odeurs du printemps et les vociférations du V8 à bord de ce morceau d'Amérique. Encore quelques minutes de bonheur, avant de rendre ce jouet finalement très attachant à son propriétaire...
Conclusion
Quadragénaire mythique et adulée, la Ford Mustang fait partie des icônes automobiles incontournables. Un morceau d'Histoire et une machine pour retourner voyager dans l'Amérique des années Rock'n Roll. Abordable en prix, comme à ses débuts, elle vous offre des sensations d'un autre temps, aux antipodes des sportives actuelles. D'ailleurs, pour le sport, ça fait un moment qu'elle a raccroché et sauf à courir en VHC, elle vous donnera tout autant de plaisir à flâner au rythme du coeur battant de son gros V8.
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