Air Liquide a organisé hier un événement destiné à attirer l’attention des leaders d’opinion sur l’état d’avancement de l’hydrogène dans l’automobile. Il a eu lieu sur le circuit de Marcoussis, dans l’Essonne, en présence de plusieurs constructeurs* et de partenaires**. Le moins que l’on puisse dire, c’est que la France n’est vraiment pas en pointe sur le sujet. C’est même l’un des rares grands pays industrialisés à ne pas avoir de stratégie arrêtée. Le thème n’a même pas été abordé lors du Grenelle de l’Environnement et pas plus à ma connaissance pour les Investissements d’Avenir… Ainsi, alors que plusieurs grands constructeurs ont annoncé leur intention de sortir des modèles d’ici 2015 et même avant, et que le développement de l’infrastructure de remplissage a déjà commencé dans certains pays (Allemagne, Corée du Sud, Japon, USA…), nos pouvoirs publics n’ont rien prévu. C’est d’ailleurs une différence majeure avec l’Allemagne qui, dans le cadre de son plan pour la mobilité électrique, a choisi elle de développer la pile à combustible.
C’est dans ce contexte, et alors qu’il travaille activement avec plusieurs partenaires, qu’Air Liquide a voulu montrer que la technologie est au point. Oui, les voitures roulent. Les journalistes ont pu d’ailleurs tester plusieurs modèles, dont la Honda FCX Clarity, la Hyundai Ix35 FCV, la Mercedes Classe B F-Cell, ou encore la Toyota FCHV-adv. On pouvait aussi voir l’Opel Hydrogen 4, le taxi Black Cab des JO de Londres, ou encore le scooter à hydrogène Suzuki Burgman.
Voilà comment ça marche :
Pour l'anecdote, LCI m'a demandé de participer au journal de 18 h pour faire le point. Voici la séquence.
Je retiens de cette manifestation plusieurs points : d’abord l’ignorance de pas mal de journalistes – persuadés que la technologie était abandonnée et à qui « on vend » plus souvent sans doute l’électrique à batterie-, et surtout l’inertie des constructeurs français. Peugeot, qui présentait en statique sa 307 CC Fisypac hybride-pile à combustible, semble avoir arrêté tout développement. Quant à Renault, il n’a même pas fait l’effort de sortir sa Scenic H2 du garage. Voilà qui laisse songeur, pour ces premiers tests sur le sol français et face aux caméras de télévision.
Le plus intrigant dans cette affaire est que nous avons des champions français de taille mondiale. Ainsi, Air Liquide est le leader de son secteur, avec une production annuelle de 9 milliards de mètres cube. Il livre de l’hydrogène partout dans le monde dans des stations, mais pas en France. Michelin, qui développe des activités en dehors du pneu, a conçu une pile à combustible qui servira de « range extender » pour augmenter l’autonomie de la F-City électrique de FAM Automobiles (une auto qui sera présentée en première mondiale au congrès Mobilis de Belfort, à la mi-novembre). J’ai même découvert que SymbioFCell, le fabricant de piles à combustible qui va équiper la Green GT en vue des 24 Heures du Mans, était situé à Chambéry. Autrement dit, nous avons une filière et les pouvoirs publics l’ignorent totalement. Je m’interroge d’ailleurs sur l’absence du CEA à cet événement.
Pour mettre fin à cette situation ubuesque, Air Liquide propose donc d’investir en France pour amorcer la naissance d’un réseau de stations-services. Il propose d’en créer une vingtaine, dans l’hexagone seul, ou réparties sur la France et l’Allemagne. Il va de soi qu’Air Liquide ira là où se situe la demande. Les journalistes présents hier ont pu constater que le plein d’un véhicule à hydrogène ne prend que 5 mn, à comparer avec les 8 h d’un véhicule électrique ou même la demi heure en recharge rapide. Et cela pour une quantité d’énergie qui permet de faire de 400 à 500 km (800 km en mode hybride pour Toyota). Air Liquide propose également d’investir dans la recherche pour développer ce qu’il appelle le « Blue Hydrogen », autrement dit un hydrogène plus « vert » obtenu à partir d’énergies renouvelables et avec moins de carbone.
Et pendant ce temps, les constructeurs étrangers avancent à grands pas. Ainsi, Mercedes va sortir en 2014 une Classe B F-Cell de série, qui sera produite en petite série (plusieurs milliers d’exemplaires) et au prix d’une hybride diesel. Pour sa part, Toyota annonce la sortie en 2015 d’une berline à hydrogène. Plus de détails seront données a priori en décembre, lors du salon de Tokyo. Ces constructeurs maîtrisent la pile à combustible, alors qu’ils sont également présents sur l’hybride et l’électrique, tout en continuant à améliorer leurs moteurs thermiques. Tout est dit. La terre tourne et elle va de plus en plus vite.
*Honda, Hyundai, Mercedes, Opel, Peugeot, Renault-Nissan
**Intelligent Energy, Michelin, SymbioFCell
Voir le diaporama :
0 commentaires:
Enregistrer un commentaire